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LES LIONS DE LA HAYE

Margit Lukács et Persijn Broersen, image fixe de La Cour du Lion

"La Cour du Lion", Margit Lukács et Persijn Broersen

Les lions n'ont pas toujours été en pierre à La Haye. Il fut un temps où le seigneur des animaux cohabitait avec celui des lieux ! Les murs du Binnenhof ont ainsi renvoyé l’écho du rugissement du roi des félidés pendant plus d’une dizaine d’années. Mais c’était il y a bien longtemps… Pour remettre la patte sur ces lions, il faut remonter au Moyen-Âge. Et qui de mieux que des archéologues pour nous transporter jusque-là ? 

 

Y’a un os…

En parallèle des travaux de restauration en cours au Binnenhof -la résidence des Comtes de Hollande à La Haye-, quelques fouilles archéologiques y ont été réalisées ainsi qu’autour du Buitenhof. C'est au cours de l'une d'elle qu'un lion fit son apparition. Ou plus exactement, un humérus et un cubitus de lion… 

Perdus au milieu des ossements de bovins, de moutons, de chiens, de cerfs, de faucons pèlerins, de haddocks, de poulets et d'autres volailles, ces deux reliques sont venues confirmer ce que nous disaient déjà les livres de comptes des intendants des comtes de Hollande. 

Os de lion visible au Informatiecentrum Binnenhof Renovatie . Photographe Frank Jansen

Humérus et cubitus d'un panthera leo

Les comptes des comtes

Dans ces livres, certaines lignes budgétaires détaillent les frais de la bouverie, c'est-à-dire du parc à bétail, situé alors sur le Buitenhof. On y retrouve les frais d’hébergement et de nourriture des animaux ainsi que le salaire des gardiens des lions. 

La construction d’une cage aux lions y apparaît dès la fin de l’année 1344. 

Plus intéressant encore, ces comptes font le détail des achats de viandes. “Des moutons et des veaux étaient achetés spécialement pour eux et abattus à La Haye. Outre les moutons vivants, on achetait également des ventres de moutons qui coûtaient plus de la moitié du prix d'un mouton entier. Selon les comptes de 1344/1345, 122 moutons entiers, 39 ventres de moutons et 22 veaux ont été achetés pour une période de 155 jours. En 1347, 187 moutons et 43 veaux ont été achetés pour 303 jours”, précisent l’archéologue Monique M.A van Veen et l’archéozoologue Dennis C. Nieweg.

Forts de toutes ces informations, les archéologues ont reconstitué l'histoire des lions de La Haye. 

Ces derniers font probablement partis des cadeaux de noce offerts à Isabelle de Hainaut, la fille du comte Guillaume IV de Hollande, et Reinald III, successeur du duc de Gueldre. En tout cas, les félins arrivent avec les jeunes fiancés, à La Haye, pour les fêtes de Noël 1344.

Au regard de la consommation de viande enregistrée après leur arrivée, les archéologues estiment que six individus s'installent alors à La Haye.

1625 Buitenhof. Singes et âne jouant. Image de la collection Adriaen Piersz

Un cadeau commun

Si offrir un lion pour de jeunes mariés peut surprendre aujourd’hui, la chose était courante au Moyen-Âge dans les milieux privilégiés. La ménagerie de la couronne anglaise au XIIème siècle comptait ainsi des lions, des léopards et des chameaux, tous offerts par des confrères. Un siècle plus tard, pour ne pas rester en reste après que l’empereur du Saint-Empire romain germanique eut offert trois léopards au roi d’Angleterre, celui de Norvège lui faisait livrer un ours polaire et Louis IX, dit Saint-Louis, lui donnait un éléphant !

A La Haye, les animaux exotiques ne manquaient pas davantage. Des singes, des perruches à collier et des paons étaient régulièrement présents à la cour jusqu’au XVème siècle. On vit même un dromadaire se balader devant la Ridderzaal au XIVème siècle !

 

Les bêtes sauvages d’aujourd’hui

Les lions des comtes de Hollande disparaissent dès 1358. On n’en retrouve plus aucune trace. Mais si on ne croise plus de ces gros félins dans La Haye aujourd’hui, on peut encore tomber sur des animaux, venus d'Afrique, en totale liberté. 

Moins impressionnantes que le lion, moins fantasques que les paons, moins amusantes que les dromadaires, les ouettes, que l’on croise à chaque coin de parc, et les perruches à collier, que l’on entend (trop?) partout en ville, se partagent le trophée de l’exotisme parmi les créatures de la ville !

De chouettes ouettes devant le Binnenhof, La Haye
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