MALIEVELD OU LA FOIRE AU MAIL !
Au Moyen-Âge, soyons honnête, même avec le meilleur réseau du monde, impossible de se connecter à Internet. Et pourtant, les mails étaient déjà là ! Alors comment donc un tel prodige se peut-il ?
Tout simplement par la magie des langues qui, de l’une à l’autre, utilisent les mêmes mots sans leur donner le même sens. Ainsi, le mail “anglais”, qui désigne un courrier, directement dérivé du mot français “malle” dans laquelle on transportait les lettres, n’a rien à voir avec notre histoire.
Une balle et un maillet
Il faut plutôt nous intéresser au mail “français” qui désigne tout autre chose. Il trouve son origine dans un jeu italien, le “pallamaglio”, où les joueurs frappent une “palla” (balle) à l’aide d’un “maglio” (maillet). Les Français garderont uniquement le mail(let) pour parler de ce sport. Pour décrire ce même jeu qui fait vite un tabac dans toute l’Europe, les Britanniques parlent quant à eux de Pall Mall. Et les Néerlandais de “maliespel” comme dans… Malieveld, le champ de mail !

Dessin d'Adriaen van de Venne, jeu de mail, vers 1620-1626
Défense de bois
Le Malieveld n’a toutefois pas été créé pour cela. Avant le XVIème, le Haagse Bos régnait encore sur ces terres. Malheureusement, aux premières heures de la Guerre de Quatre-Vingt ans qui opposa les Provinces des Pays-Bas à la Couronne espagnole au XVIème siècle, on pratiqua des coupes claires dans les bois afin de construire des défenses à la hâte. De fait, on avait préféré, quelques années plus tôt, construire un magnifique hôtel de ville plutôt que des remparts…
Mise à plat
On s’en doute, un mur en bois et quelques pieux plantés ça et là n’ont pas empêché les Espagnols de se rendre maître de la ville. Et les arbres arrachés laissèrent le terrain à nu pendant trop longtemps pour permettre une repousse. Alors, quelques années plus tard, on arase ce qui reste de cette ancienne crête de plage déplumée pour obtenir une belle esplanade engazonnée, bordée d’allées plantées qui, à l’époque, rejoignait quasiment le Binnenhof.

Dessin en couleur de l'actuelle Koekamplaan en 1730, réalisé par Daniël Marot
Protection éternelle
Mais le Malieveld aurait pu être encore beaucoup plus grand. Dès le départ des Espagnols, les Etats de Hollande envisagent en effet d’exploiter férocement le Haagse Bos afin de payer les mercenaires engagés dans le conflit. Fort heureusement, Guillaume d’Orange coupe court à toute coupe. Il signe l’Acte de Rédemption (1576) qui protège, encore aujourd’hui, la forêt de La Haye de toute exploitation forestière.
Un lieu animé
Les joueurs de mail se contentèrent donc du Malieveld durant de nombreuses années avant que le jeu ne donne naissance à de nouvelles disciplines qui nous sont plus familières : le croquet et le golf.
Si on ne s’amuse plus au mail, le Malieveld manque rarement d’animation. Lieu propice aux manifestations d'ampleur, il accueille régulièrement des concerts à grande échelle. Les Rollings Stones, Bruce Springsteen, P!nk et Coldplay, entres autres, ont enflammé le mail. D'autres bêtes de scène occupèrent les lieux jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale. Un zoo occupait alors une bonne partie du Malieveld.
Et depuis samedi dernier, c’est la Konings Kermis, la “kermesse du roi”, qui y met la foire !
D’ailleurs, il y aurait deux ou trois choses à dire sur cette foire mais ça, c’est une autre histoire que je vous raconterai une autre fois.

Le zoo de La haye en 1730

Manifestation contre l'apartheid, 1977

Exposition agricole, 1872

Les parkings en surface, 1977